CIAP Lapurdum
7 Rue des Gouverneurs
Réalisée en 2022 dans le cadre du festival Points de Vue, L’attente est une fresque monumentale discrète et pourtant magnétique. Sur le mur d’un bâtiment classé du centre historique de Bayonne, l’artiste a peint une jeune fille vue de dos, debout dans une posture calme, presque solennelle.
Le regard du public est invité à glisser lentement le long de son chignon soigneusement noué, de sa nuque dégagée, de l’élégance simple de ses vêtements. L’identité du personnage nous échappe : son visage est caché. Ce choix, loin d’être anecdotique, participe de la force silencieuse de l’œuvre. Il ne s’agit pas de raconter une histoire précise, mais de donner forme à une émotion partagée : celle de l’attente, de la projection intérieure, d’un temps suspendu.
Le site choisi, une ancienne porte à l’architecture néo-classique, rehausse encore la solennité de la scène. La figure semble nichée dans une alcôve sacrée, comme une statue de l’Antiquité. Elle veille. Elle attend. Et dans ce face-à-dos imposé au regardeur, elle nous oblige à ralentir, à observer, à entrer dans un autre rythme.
Ce geste pictural délicat s’inscrit en cohérence avec le voisinage immédiat du CIAP (Centre d’Interprétation de l’Architecture et du Patrimoine), comme une passerelle entre mémoire architecturale et regard contemporain.
Avec L’attente, Elisa Capdevila inscrit la sensibilité féminine dans la pierre de la ville, avec pudeur et justesse. Un geste fort, tout en douceur.
Née à Barcelone, Elisa Capdevila est une artiste peintre formée à l’école de dessin et peinture de La Llotja, l’une des plus anciennes institutions artistiques de Catalogne. Son travail dans l’espace public est reconnaissable à sa manière de capter des instants suspendus, souvent intimes, qu’elle restitue avec une grande finesse d’exécution et un fort pouvoir émotionnel. Bien qu’elle évolue dans le champ de l’art urbain, son œuvre puise dans les codes de la peinture classique : composition équilibrée, maîtrise de la lumière, traitement subtil des carnations et des étoffes.
Capdevila porte un regard humaniste sur les corps qu’elle représente : des silhouettes souvent féminines, qui ne cherchent pas à séduire mais à exister pleinement, dans leur intériorité. En transposant ces scènes dans l’espace urbain, elle crée un dialogue entre l’intime et le public, entre le quotidien et l’universel.
Son approche picturale délicate contraste avec la rudesse des murs et du béton, et redonne au geste mural toute sa dimension poétique.
Invitée dans de nombreux festivals en Europe et en Amérique latine, Elisa Capdevila fait partie de cette nouvelle génération d’artistes qui renouent avec la figuration pour raconter le monde autrement, sans effet de démonstration ni provocation.