Office de Tourisme de Bayonne
25 place des basques
Après une résidence de trois semaines à Saint-Palais où il avait réalisé un parcours de peintures murales autour du vol d’une palombe, l’artiste madrilène Taquen poursuit ce fil symbolique à Bayonne avec une fresque intitulée El Proceso. Sur les murs contemporains de l’Office de Tourisme, il fait apparaître une nuée de palombes en mouvement.
Le motif de cet oiseau migrateur, emblématique du Pays Basque, devient ici une métaphore fluide et silencieuse du passage : celui des oiseaux bien sûr, qui franchissent les Pyrénées vers le sud, mais aussi celui des humains. En choisissant ce lieu de transit qu’est l’Office de Tourisme, Taquen souligne la dimension de départ, d’arrivée, de point de passage qu’il associe à toute migration — qu’elle soit volontaire, touristique ou contrainte.
D’un côté du bâtiment, les formes et couleurs sont affirmées, presque sculptées par la lumière ; de l’autre, elles s’estompent jusqu’à la transparence, accompagnant la course du soleil et la géométrie du bâtiment signé Gayet Roger Architectes. Une œuvre discrète mais sensible, conçue pour se révéler lentement à celui qui prend le temps d’observer.
Né à Madrid, Taquen est un artiste visuel et muraliste dont le travail explore les notions d’équilibre, de transition et de lien entre les êtres vivants. Ses fresques, souvent réalisées in situ, mêlent géométrie douce et représentations stylisées de la faune, en particulier des oiseaux, qu’il considère comme des symboles de liberté, de mouvement et d’appartenance.
Formé aux arts graphiques, il développe un langage mural à la fois épuré et poétique, dans lequel le geste pictural laisse place à la suggestion plus qu’à la figuration frontale. Son approche respecte toujours les lieux où il intervient : architecture, lumière, temporalité et mémoire locale nourrissent ses compositions.
Taquen est régulièrement invité dans des festivals en Europe et en Amérique du Sud. Il fait partie de cette génération d’artistes urbains soucieux d’ancrer leur pratique dans un dialogue respectueux avec le vivant et l’espace public.
Le premier projet proposé par Taquen était ambitieux : une peinture monumentale, avec un grand dégradé coloré couvrant la façade du sol au toit. Le bâtiment aurait été transfiguré.
L’équipe de l’Office de Tourisme et les architectes en charge du lieu soutenaient le projet, mais on sentait poindre une légère inquiétude quant à son impact visuel. Trop voyant ? Trop radical pour un site aussi central ?
C’est dans ce contexte de tension, presque en temps réel, que l’artiste a entièrement revu sa copie. En quelques heures, il a proposé une toute nouvelle piste, plus sobre, plus subtile, mais aussi totalement inédite dans sa pratique : une nuée de pigeons ramiers, tous peints à main levée, d’un seul trait, sans jamais lever le pinceau.
Cette contrainte volontaire transformait le geste pictural en performance. Elle a nécessité une concentration totale, une grande maîtrise du corps, et une confiance absolue dans le trait. Pour Taquen, c’était une prise de risque. Pour nous, un pari.
Il a fallu de nombreuses discussions, un ajustement permanent, et cette forme de foi partagée dans la capacité de l’artiste à trouver la bonne forme, au bon moment.
À la fin du chantier, le doute avait laissé place à l’évidence. L’œuvre trouvait sa place, avec justesse sur la place des Basques.